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Biographie

Isabeau de Rouffignac explore la complexité de différentes cultures sur lesquelles elle porte un regard très personnel, toujours curieux et fondamentalement empathique. Une ligne de conduite comme un fil qui traverse ses travaux et leur donne leur cohérence : partager avec l’autre, se connaître, prendre le temps, apprendre sa langue, se faire oublier.
Très engagée, elle invente un langage qui lui est propre et qui lui permet de faire passer un message environnemental, social, humanitaire, politique. C’est le cas dans ses deux derniers travaux en Inde, qui sont des plaidoyers.
En 2019, Isabeau de Rouffignac fut finaliste de la bourse des Amis du musée départemental Albert-Kahn avec sa série : « Bhopal, des saris pour mémoire » qui pointe les conséquences de la pire catastrophe chimique que le monde ait connu.
 Sa dernière série « Marbre à tout prix » que nous récompensons aujourd’hui raconte les difficiles conditions de travail des mineurs dans les carrières de marbre.

Marbre à tout prix

Mon travail « Marbre à tout prix » fait à Rajsamand, au Rajasthan, initié il y a deux ans lors d’un séjour en Inde, se compose d’une série de 30 photos. Il n’a été possible que par les relations étroites nouées avec les activistes et les villageois qui m’ont régulièrement et durablement accueillie.

Marbre, translucide dans les palais, veiné d’orangé, comme une feuille légère et fragile. Marbre. Autour de nos baignoires et de nos piscines, dans nos halls somptueux, dans nos aménagements récents comme au temps de nos rois. L’Inde est un des plus gros exportateurs de marbre et le Rajasthan fournit 90 % du marbre qui quitte le pays. Dans cette région, les carrières à ciel ouvert s’étendent à perte de vue, créant dans le paysage aride de gigantesques escaliers blancs où s’activent hommes et machines.

Depuis quelques années, la demande en marbre n’a fait que s’accroître, rendant toujours plus difficiles et dangereuses les conditions de travail.
Dans cette série, j’interroge l’univers des ouvriers du marbre sur leur lieu de travail, à travers les paysages, des portraits, des détails. Les mineurs sont vêtus de leurs vêtements quotidiens blanchis par la poussière de marbre qui s’incruste partout. Souvent, ils ne sont chaussés que de sandales. Ils devraient porter casques, gants et chaussures de protection, mais il fait chaud et, surtout, ces équipements de sécurité sont rarement fournis ou leur port n’est pas obligatoire. Quand il l’est, aucune vérification officielle ne vient s’assurer que les ouvriers soient correctement protégés. Tout au long de ce travail, je n’ai jamais vu d’ouvriers correctement protégés.

Au Rajasthan, la moitié des emplois sont fournis par le secteur du marbre. Sa présence en sous-sol a fait disparaître une part trop importante de l’agriculture. Son exploitation assèche les terres et il faut bien vivre de quelque chose. Certains travaillent là, comme leurs parents avant eux. Comment changer de vie quand on ne sait ni lire ni écrire et que l’on ignore ses propres droits ? Alors, on travaille au jour le jour.

Avant d’extraire le marbre, certains d’entre eux étaient agriculteurs et propriétaires de leur terre. Mal informés de sa valeur réelle, ils l’ont souvent cédée à vil prix et se retrouvent à travailler pour celui qui l’a acquise ainsi. Il y aussi ceux qui sont venus d’autres régions de l’Inde pour travailler ici et retourneront chez eux pendant les mois de mousson. Les conditions de travail sont telles que beaucoup souffrent de déshydratation, de blessures mal soignées, de problèmes auditifs. Surtout, les pathologies respiratoires sont très fréquentes, notamment la très dangereuse silicose provoquée par l’inhalation de particules de poussière de silice, qui détruit les poumons. En 2016, une étude a évalué qu’un mineur de marbre sur deux était ou sera un jour atteint de silicose ou de silico-tuberculose. Cela représente plus de 800 000 personnes.

L’Etat a mis en place des mesures pour améliorer les conditions de travail et prévenir les risques sanitaires mais elles restent généralement lettre morte. Pendant ce temps, le marbre continue de détruire les corps et de tuer, mais il faut bien, chaque jour, aller travailler….

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